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 Groupe Commune de Paris de La Fédération Anarchiste

Maurice RajsFus

Maurice RajsFus

« Que d’autres prennent la suite… »

Maurice Rajsfus est décédé le 13 juin 2020, ses enfants, ses amis ont décidé d’organiser une journée de rencontres autour des thèmes qui ont animé sa vie militante et personnelle. Des amis de la FA, de notre groupe étaient présents, ce 4 juillet, pour démontrer la permanence des luttes, l’actualité de l’action de Maurice Rajsfus. Parmi les ouvrages présentés, tous écrits par lui, on peut en retenir un soulignant un aspect déterminant de son militantisme : « Je n’aime pas la police de mon pays » sous-titré « L’aventure du bulletin Que fait la police ? » récemment réédité par les éditions Libertalia. Une manière pour nous de lui rendre hommage.

Une ambition pleine de risques

Maurice s’est attaqué dans sa vie à des thèmes forts : la rafle du Vel d’hiv, la guerre d’Algérie, la répression de mai 68, le peuple palestinien et ses livres, une cinquantaine, montrent son engagement. Ce dernier ouvrage au titre-choc dérange, interpelle, surtout si peu de jours après sa mort. Il aborde un des éléments les plus violents de l’État coercitif, sa police. « Décrire la police pour ce qu’elle est relève d’une ambition pleine de risques, et rares sont ceux qui se sont lancés dans cette aventure ». Pourquoi cet engagement ? Laissons parler Maurice : « Depuis mon enfance, les hommes qui portent l’uniforme des forces de l’ordre me posent de réels problèmes. […] 16 juillet 1942. J’avais 14 ans. A l’aube de cette belle journée d’été, des hommes en uniforme de la police française avaient violemment frappé à notre porte, avant de m’arrêter avec mes parents et ma sœur ». Par hasard, il sera un rescapé de cette sinistre rafle. Pourtant sa démarche n’est pas animée par un « esprit de vengeance », il veut souligner et c’est le sens de son combat, les atteintes aux libertés publiques et la permanence dans l’attitude des forces de l’ordre. Répression des grèves à la Libération, répression à l’égard des Algériens, répression pendant mai 68 et après, répression à l’égard des sans-papiers, répression… Cette litanie finira-t-elle un jour alors que le ministre sous tous les gouvernements couvre ses troupes ? Toujours ? il y aurait 3 000 policiers par an en moyenne qui passent devant les instances disciplinaires, connaît-on les suites ? Dans une démocratie, les agents publics doivent rendre des comptes et les habitants doivent connaître la vérité. En cela notamment, le combat de Maurice est d’une actualité rare.

Au cœur de son livre, Maurice pose la question centrale : « L’homme a-t-il besoin de disposer d’une police répressive ? »

Un objectif : informer

À partir de 1968, il commence à collationner des coupures de presse et constituera un fichier de 14 000 fiches. A noter que les archives de Maurice Rajsfus seront versées à la BDIC et seront largement consultables selon les vœux de la famille.

En 1994, il crée avec quelques amis et notamment Jean-Michel Mension, l’Observatoire des libertés publiques avec comme objectif : informer. Son dernier livre relate ainsi l’aventure du bulletin « Que fait la police ? » qui « se donne pour tâche initiale de recenser toutes les informations concernant les petites et les grandes exactions de policiers ». Après avoir connu la diffusion par voie postale, ce bulletin est publié sur internet jusqu’en 1994. Le livre comporte des dessins de Siné, Tignous, Faujour et une sélection des éditoriaux les plus marquants, le dernier est consacré à la répression des manifestations sur Nantes contre l’aéroport de Notre-Dame des Landes.

Ce qui ressort de ce petit livre, c’est la volonté, la pugnacité d’un homme qui refuse un état de fait. Les libertés publiques doivent être défendues. « La société démocratique est instrumentalisée pour être conduite à rejeter ces libertés qui constituaient ses règles de vie. Lorsque l’on s’habitue à la police, il est possible d’oublier l’idée même de liberté sous le vain faux-semblant que la sécurité de tous serait assurée ».

Tel un appel, un clin d’œil de cet homme plein d’humanité, ces mots : « S’il y a un souhait à exprimer, c’est que d’autres prennent la suite… »

  • Je n’aime pas la police de mon pays

Maurice Rajsfus

Ed. Libertalia, réédition juin 2020

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